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mardi 5 janvier 2016

Impressions indiennes # Episode 4 • La présence des castes

Rajasthan : Naissance d'un séjour... 

Episode 4 • La présence des castes

Par Patrick Wasserman (photos M. Birouste & Morarka GDC)

Région de Nawalgarh, Shekhawati...

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2h de route en compagnie de Chinmay (voir Episode 3), que je ne vois pas passer tant celui-ci est bavard, joyeux, et enthousiaste. Nous parvenons à Sikar (Shekhawati) où nous sommes attendus par Kan Singh, parti la veille, et qui a revêtu son turban rajpoute traditionnel de couleur rouge vif, et Arjun, un collaborateur de Sahaj parlant peu voire pas du tout l'anglais. Chinmay, bien que grand parleur, me paraît parfaitement sincère et clair dans son point de vue sur le tourisme rural, qui coïncide sur beaucoup de points avec le nôtre. Kan Singh, lui aussi très "nature", semble avoir très bien intégré notre vision des choses. Je comprends que Morarka Foundation, trop occupée par ses activités dans le domaine agricole qui ont une dimension "industrielle" (vermiculture et agriculture bio), a préféré collaborer en les soutenant des gens comme Sahaj pour la mise en œuvre "opérationnelle" de l'activité touristique. Ils seront nos interlocuteurs privilégiés pour nos voyages au Rajasthan...

Sahaj et Morarka Foundation ont tout organisé pour ma venue au Shekhawati : visites et repas rajpoutes, réservation d'une chambre à Nawalgarh, où apparemment, je suis invité par Morarka.

Les limites de ce qu'il est possible de réaliser au Shekhawati dans un premier temps me paraissent de mieux en mieux définies : l'organisation sociale traditionnelle de ces villages rajpoutes est très ancrée (castes, familles, place de la femme, etc.), et la dimension "communautaire" s'y manifeste d'une toute autre façon de ce que je pouvais imaginer dans le cadre d'un futur CBT. Dans chaque village (un "village", en Inde, peut compter jusqu'à 20000 habitants !), un très petit nombre de familles de la caste "Rajpoute" (sous-caste des "Chatrias" - les guerriers), voire une seule, joue un rôle dominant. Ces familles occupent cette position dominante depuis des siècles, sont très respectées, et écoutées par les autres.

En fait, chaque caste ou sous-caste tient son rôle, en relation avec les autres, et l'équilibre économico-social du village repose sur cette structuration. Ainsi, lorsque la famille dominante, qui est en quelque sorte le plus gros "consommateur" du village, quitte celui-ci pour rejoindre une grande ville par exemple, cet équilibre se rompt et nombre de métiers disparaissent, entraînant la migration des castes pratiquant ces métiers. La famille dominante (dont la maisonnée - souvent des "havelis" - et terrains sont partagés entre les frères) serait la seule, d'après mes interlocuteurs, à même d'accueillir nos voyageurs. Les havelis sont très agréables, comprennent plusieurs chambres potentielles, et autre facilités. Leur niveau d'éducation et l'écoute dont elles bénéficient de la part de la population, leur permettrait de montrer l'exemple non seulement pour organiser et réunir des activités villageoises autour de nos séjours, mais aussi après 2 ou 3 années d'activité, initier la création de maisons d'hôtes dans d'autres familles. D'après ce que je comprends, les familles dominantes ne comptent pas nécessairement s'enrichir grâce au tourisme, hospitalité rajpoute oblige, et seraient sans doute prêtes à en faire bénéficier la collectivité d'une manière ou d'une autre restant à définir. Leur intérêt serait bel et bien une ouverture et un échange vers les étrangers que nous sommes. Les femmes, pour le moment très en retrait lors de nos visites, seraient, selon les hommes que je questionne à ce sujet, très demandeuses de partage, et leur réserve (qu'ils interprètent comme de la timidité) ne tarderait pas à se dissiper. Même s'il est vrai que la famille dominante trouverait là un moyen supplémentaire d'accroître pour le moins sa crédibilité et donc sa domination, je ne vois pas comment nous pourrions, au Shekhawati au moins, échapper à cette donnée.

Nous partons en exploration et rendons visite à plusieurs familles présenties pour accueillir les futurs voyageurs au Rajasthan de Rencontres au bout du monde...


- DUJOD. Haveli "Badam Niwas". Propriétaire : Bhanwar Singh (ex. "Sarpanch").
2 frères sur les 5 que comprend la famille y habitent. Très beau haveli dans un village apparemment plus riche (beaucoup sont allés faire fortune dans les Emirats). Beaucoup de chambres. Salle de bain traditionnelle. Très beau petit temple à Shiva (10è siècle) en haut d'une colline de 200 m env. près du village de Harsh : vue à des km sur le paysage semi-désertique du Shekhawati, sculptures d'une très grandes finesse éparpillées un peu partout après la destruction du temple par Aurengzeb, dizaines de singes un peu partout.

- MUNDWARA. Maison récente dans la campagne. Propriétaire : Deyal Singh, jeune et discret.
Chambres non visitées, mais excellent repas exclusivement composé à partir de produits de la ferme (bio).

- KATRATHAL (village de Kan Singh). Env 15 km de Sikar. Un des plus grands village (20000 habitants).
Haveli déserté par la famille partie pour Kolkota et Mumbay, et qui a construit, juste à côté, pour ses visites "au pays", une maison de nouveaux riches en béton.
Temple Jaïn et mosquée.

- RURAL RESEARCH CENTER de la Morarka Foundation à NAWALGARH. Très bon point de rencontre avec la Fondation et jardin potager expérimental à visiter.





Le soir, ballade nocturne dans la gadoue (il pleut) au milieu des dizaines de havelis plus ou moins délabrés de Nawalgarh, aux murs entièrement décorés de fresques représentant des scènes de la vie traditionnelle rajpoute ou du Ramayana et Mahabaratha.

A suivre...



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